Shin Joom-hee, directrice artistique de Burning, prix Vulcain 2018

Lors de la remise du Prix Vulcain, le 23 octobre 2017, au cinéma Les Fauvettes, Josefin Åsberg a partagé son expérience avec la CST.

Comment organisez-vous votre travail, avant et pendant le tournage ?

Je commence par la lecture du scénario et je le divise selon les différents lieux de tournage, par exemple si on construit un décor dans un studio ou si on tourne en extérieur. Et évidemment j’en discute avec le réalisateur et le directeur de la photo. On se rencontre au début pour définir le concept visuel du film et l’ambiance qu’on souhaite lui donner. Ensuite on commence les repérages et je fais les liens et selon le projet je fais des recherches – par exemple pour Snow Therapy, on a visité plusieurs villages des Alpes.

Donc ça représente une partie important du travail ?

Oui, avant de me déplacer, j’avais fait des recherches sur tous les villages alpins de ce style, aussi bien en ce qui concerne la situation géographique que le style et l’ambiance de l’endroit.

J’essaie également de trouver de bons collaborateurs – j’ai des collègues avec qui j’ai l’habitude de travailler mais ils ne sont pas forcément disponibles – je rassemble donc une équipe sympa pour le département décor, ce qui est très important. En principe je travaille avec les mêmes menuisiers et les mêmes peintres si nous tournons en Suède. Si nous sommes à l’étranger, je dois en trouver de nouveaux.

Quelle formation avez-vous suivi pour devenir directrice artistique ?

J’ai étudié l’Art pendant deux ans et demi, puis l’architecture et la conception de décors. Ensuite j’ai été engagée comme assistante de trois directeurs artistiques différents pour mes trois premiers films. C’était très utile de voir trois façons différentes de travailler – les films étaient très différents aussi – l’un était un thriller, un autre se passait dans les années 70 – donc un film d’époque – et le dernier était plus poétique. En fait c’était avec le directeur artistique d’Ingmar Bergman et elle a reçu un Oscar pour « Fanny et Alexander ». C’était très amusant de travailler avec elle. J’ai beaucoup appris à voir les différentes manières de travailler – j’ai pu piocher ce qui était bien et laisser de côté ce que je trouvais moins bien.

A la suite de ces trois long-métrages, on m’a demandé de faire mon premier film en tant que directrice artistique, sur un film de Lukas Moodysson, « Lilya 4-Ever », que nous avons tourné en Estonie – Julie Gayet en a parlé lors de la remise du prix hier. C’était le premier film sur lequel j’avais la seule responsabilité de la décoration.

C’était votre premier souhait, de faire de la décoration artistique au cinéma ?

Oui, mais j’ai également travaillé comme stagiaire à la télévision suédoise pendant six mois, dans leur département de direction artistique – j’ai travaillé sur plusieurs projets et je me suis rendue compte de ce qu’était la direction artistique, je l’ai trouvée très intéressante et amusante. Selon le réalisateur avec qui on travaille, ça peut être très différent, dans un sens positif. Chaque film apporte de nouveaux défis.

J’ai étudié l’Art pendant deux ans et demi, puis l’architecture et la conception de décors. Ensuite j’ai été engagée comme assistante de trois directeurs artistiques différents pour mes trois premiers films. C’était très utile de voir trois façons différentes de travailler – les films étaient très différents aussi – l’un était un thriller, un autre se passait dans les années 70 – donc un film d’époque – et le dernier était plus poétique. En fait c’était avec le directeur artistique d’Ingmar Bergman et elle a reçu un Oscar pour « Fanny et Alexander ». C’était très amusant de travailler avec elle. J’ai beaucoup appris à voir les différentes manières de travailler – j’ai pu piocher ce qui était bien et laisser de côté ce que je trouvais moins bien.

Quel film a été le plus stimulant pour vous ?

Tous ont été très stimulants à leur manière. Mais le premier était sympa parce que l’action se passait dans l’ancienne Russie. En fait nous avons construit les décors en studio – c’était une grande responsabilité parce que c’était le premier film que je faisais seule. Mais c’était sympa aussi de faire « Snow Therapy » et « The Square ».

Combien de films avez-vous fait déjà ?

Je ne sais pas !!! J’ai fait mon premier film en 2002 – il y a 15 ans donc.

Quelle est votre relation avec le réalisateur ? Et avec le directeur de la photo ? Comment travaillez-vous ensemble pour créer l’ambiance visuelle ?

Je commence très tôt dans la préparation du film, surtout avec Ruben parce que nous sommes amis. Actuellement, pendant le lancement de « The Square », nous parlons déjà de son prochain film. Il nous l’a présenté – au directeur de la photo et moi-même – puisque nous étions tous les trois au Festival du film de San Sébastian. Ensuite il écrit le scénario. Donc je commence avant même que le scénario existe sur les films de Ruben ! Nous parlons beaucoup ! Sur les autres projets j’essaie également de commencer le plus tôt possible, à faire des recherches et réfléchir au ressenti qu’auront les spectateurs en regardant le film. A travers les couleurs par exemple… est-ce un film très réaliste ? Et même s’il est réaliste, on peut inciter les gens à le ressentir d’une certaine façon, même si ce n’est pas évident. On peut dégarnir un décor et choisir des coloris qui provoqueront un certain ressenti chez les spectateurs. Je travaille de très près avec le réalisateur et avec le directeur de la photo sur les différents décors. Je fais beaucoup de recherches pour trouver les extérieurs adaptés, ainsi que sur le lien entre les décors – ça fait un grand puzzle ! Par exemple, si on choisit une maison comme décor, on ne pourra plus filmer un autre élément parce qu’ils se ressemblent trop. Il faut faire beaucoup de recherches pour trouver les endroits idéaux.  Je travaille avec la personne qui fait tous les repérages et je sélectionne les endroits les mieux adaptés pour les présenter au directeur de la photo et au réalisateur. Eux n’ont pas besoin de voir tous les décors repérés – il y en a parfois beaucoup – c’est moi qui leur en présente deux… Pour certains films, il y a vraiment beaucoup de décors et je suis le filtre entre la personne qui fait les repérages et le réalisateur. Comme ça, j’ai tous les décors en tête et je sais ce que je vais en faire. C’est donc plus facile pour moi d’expliquer au réalisateur pourquoi on devrait tourner ici plutôt que là… parce qu’ensuite on ira tourner dans un ce décor… ça fait que nous aurons une bonne cohérence entre les endroits.

Même si vous travaillez en équipe, c’est toujours le réalisateur qui a le dernier mot ?

Oui bien sûr ! Mais on espère toujours travailler avec un réalisateur qui nous laisse la liberté dans un certain cadre.

Propos recueillis par Myriam Guedjali, responsable Communication de la CST.